L’Inde est en pleine croissance et attire l’attention du monde et des investisseurs. Pourtant, faire des affaires en Inde n’est pas sans risque pour les entreprises étrangères. Nous vous proposons de faire un point sur cette attractivité économique ainsi que sur les obstacles potentiels à prendre en compte pour profiter des opportunités qu’offre le pays.
Après avoir acquis son indépendance de la Grande Bretagne en 1947, l’Inde commença par s’inspirer de l’Union Soviétique en suivant des principes de souveraineté économique. Le pays adoptera notamment une politique de nationalisation et une industrialisation par substitution aux importations, l’isolant des investissements et du commerce international. Ce ne fut qu’en 1991, alors que l’URSS se dissout et que la balance des paiements indienne est en crise, que le pays entamera la libéralisation et la privatisation progressive de son économie. Pour ce faire, l’Inde dut se rapprocher du FMI afin d’obtenir des prêts en échange de réformes.
Ainsi, les barrières douanières et les quotas furent réduits ou supprimés, la roupie dévaluée, l’inflation contenue, les dépenses réduites et la croissance améliorée. La croissance de l’Inde atteignit alors un niveau moyen de 6-7% du PIB par an, alors que jusqu’en 1990, elle était toujours restée inférieure à 4% par an.
Cette croissance sera stimulée par le transfert de main-d'œuvre du secteur agricole vers les autres secteurs économiques. En effet, selon la Banque Mondiale, la part du secteur agricole dans le PIB est passée de 28% en 1990 à 17% en 2022. Dans le même temps, la part du secteur des services est passée de 37 % en 1990 à 48% en 2022.
Cette augmentation est également le résultat du développement des technologies de l’information et des logiciels. Le pays a capitalisé sur sa grande population anglophone pour devenir un exportateur majeur de services informatiques, de travailleurs du logiciel et de service d’externalisation. Selon l’agence indienne de promotion des investissements, le pays est la première destination mondiale pour l’externalisation (51 %) en 2022.
Ainsi, en 2022, alors que le pays fête les 75 ans de son indépendance, il devient la cinquième puissance économique mondiale, place auparavant occupé par le Royaume-Uni. Selon les données du FMI le PIB de l'Inde est évalué à 3 820 Mds de dollars en 2023, contre 3 479 Mds pour celui du Royaume-Uni. Cette ascension est d’autant plus marquante que l'économie indienne se situait au onzième rang mondial il y a dix ans et au quinzième en 1990. Par ailleurs, selon l’étude économique réalisé en 2019 par l’OCDE, l’Inde est l’économie du G20 qui connaît la croissance la plus rapide depuis 2014.
Cependant, toujours selon les données du FMI, en raison des écarts de population, le PIB par habitant indien est 18 fois inférieur à celui du Royaume-Uni (2 850 dollars en Inde contre 52 430 dollars au Royaume-Uni).
De plus, l’Inde, grâce à une influence multipolaire, est devenue un acteur incontournable de la scène internationale. Le pays est proche de la Russie tout en étant un partenaire privilégié des Occidentaux. Le pays a rejoint en 2017 l’Organisation de Coopération de Shanghai, une organisation régionale réunissant 9 pays dont la Chine, l’Iran, le Pakistan et la Russie. Cette organisation a pour objectif la sécurisation de la zone eurasienne mais elle voit ses projets s’étendre à la coopération économique et politique, contrebalançant l’influence américaine et européenne dans les autres organisations. Ainsi, l’année 2023 fut un symbole de ces relations multipolaires alors que le pays a tenu la présidence à la fois du G20 et de l’OCS.
Tous ces éléments font que l’Inde attire plus que jamais les investisseurs étrangers. Selon les données de la Banque Mondiale l’Inde a accueilli un total de 49,94 Mds de dollars d’IDE en 2022, son record étant de 64,36 Mds de dollars en 2020. De plus, selon le rapport sur l’Investissement dans le monde de la CNUCED, l'Inde se classe au 7ème rang mondial des économies d’accueil d’IDE en 2021, devant l’Afrique du Sud et derrière le Brésil.
Notons que la France compte parmi les plus grands investisseurs étrangers en Inde, occupant la 7ème place en 2022 avec un stock de 25 Mds d’euros selon le ministère de l’Économie. De plus, le stock d’IDE français en Inde a été multiplié par 8 entre 2013 et 2022. Par ailleurs, ce stock est probablement sous-évalué, en raison du transit d’une partie des flux par des juridictions tierces, telles que Maurice et Singapour, qui à elles seules représentent 50% des IDE entrant en Inde. Les investissements français en Inde portent principalement sur le secteur de l’industrie extractive (69%), puis sur les services informatiques, de transports et financiers (20%). De nombreux investissements sont réalisés par les groupes français pour délocaliser leurs fonctions de support informatique mais on dénombre également plus de 100 filiales françaises réalisant des activités d’ingénierie et de R&D en Inde. L’enquête INSEE/OFATS de 2020 recense officiellement près de 716 filiales françaises en Inde, et plus de 1051 implantations, qui représentaient 450 000 emplois pour un chiffre d’affaires de 15,2 Mds d’euros. La plupart des groupes français, dont 37 entreprises du CAC 40, sont désormais implantés en Inde.
Néanmoins, en ce qui concerne les échanges commerciaux, la France pourrait mieux faire. La France se classe au 19ème rang des clients de l’Inde avec 1,76% de part de marché, alors que son premier client, les Etats Unis, représentent 17,6% des exportations indiennes. Pour ce qui est des importations, la Chine est le principal fournisseur de l’Inde, avec une part de marché de 14,2%, alors que la France n’est que le 29ème, avec une part de marché de 0,7% en 2022.
Ainsi, l’Inde est forte de plusieurs atouts pour attirer les IDE. Le premier étant le réservoir de main-d’œuvre qu’offre ce pays. L’intégration du pays dans le commerce international constitue également un terrain favorable aux investissements étrangers : le pays totalise 86 Traité Bilatéraux d’Investissements, dont un avec la France depuis 1997. Et enfin, parmi les éléments favorisant les investissements étrangers, nous pouvons citer les mesures incitatives réalisés par le gouvernement indien. Ces mesures vont de l’assouplissement des règlementations administratives, via la suppression de certaines exigences d’approbation, à l’augmentation de la limite des IDE.
En effet, sa progression de la 130ème place en 2016 à la 63ème place en 2020 dans le rapport Doing Business, qui mesure la facilité de faire des affaires, de la Banque Mondiale, témoigne des efforts déployés par le pays.
Cependant, il convient de prendre en compte les risques qui peuvent entraver le bon déroulé des affaires.
Qualité des infrastructures. La mauvaise qualité des infrastructures routières est un obstacle potentiel à l’investissement étranger. En effet, selon l’indice de performance logistique 2023 de la Banque Mondiale, mesurant la qualité des infrastructures commerciales et de transports, la position de l’Inde est aujourd’hui plus faible comparée à la plupart des pays asiatiques. Classée 38ème, sa position est inférieure à celle de la Chine (19ème), de la Malaisie (26ème) ou encore de la Thaïlande (34ème).
Score de liberté Economique. L’Inde à un score de liberté économique très faible. Selon l’Indice 2023 de liberté économique réalisé par la fondation Heritage, l’économe indienne est classée 131ème sur 176 économies évaluées. Parmi les raisons expliquant ce score, nous pouvons citer le cadre règlementaire lourd, l’ingérence étatique, l’importance de l’emploi informel (entre 75% et 85% des emplois) et la faiblesse de l’Etat de droit.
Risque de corruption. Principal obstacle pour les investissements dans le pays, en 2022 le pays occupait la 85ème position sur 180 pays dans l’Indice de perception de la corruption réalisé par Transparency International. Son score est également inférieur à la moyenne régionale. En effet, bien qu’ayant un score largement supérieur à certains pays limitrophes tel que le Pakistan, le Bangladesh ou le Cambodge, son score est inférieur à d’autres pays de la région tels que la Chine, le Vietnam ou la Malaisie. Ainsi, bien que la loi indienne interdise les pots-de-vin, selon le baromètre de Transparency International, l’Inde est le premier pays d’Asie où des citoyens (39%) ont payé des pots-de-vin à des agents publics en 2020.
Contrefaçon. La contrefaçon en Inde touche principalement les biens de consommation, mais s’étend à d’autres secteurs tels que la monnaie ou les documents bancaires. Selon l’organisation indienne ASPA, la monnaie était le 4ème secteur le plus touché par la contrefaçon en 2020.
Changement climatique. Selon l’indice mondial des risques climatiques de German Watch, l’Inde était le 7ème pays le plus affectés par les évènements météorologiques extrêmes en 2019. Par ailleurs, selon le programme international pour l’action sur le climat de l’OCDE, l’Inde est le 2ème pays où la population est le plus exposée aux canicules. Plus précisément, le rapport 2023 sur les évènements climatique, publié par le Centre pour la science et l’environnement basé à New Delhi, nous apprend que l'Inde a connu des événements météorologiques extrêmes (cyclones, fortes pluies, canicules, etc.) sur presque la totalité (88%) des jours des neuf premiers mois de l'année 2023
Risque sécuritaire. Les principales sources d’insécurité en Inde sont le terrorisme, les groupes d’insurrections et les tensions avec certains pays voisins.
Risque d’ingérence. Souvent sous-estimé, l’espionnage économique est très développé en Inde et il est d’autant plus problématique que les activité qui y sont établie par les société occidentales et en particulier françaises sont des activité sensibles telles que les fonctions de support informatique, d’ingénierie.
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